Vos référentes Métiers du commerce
Coline LE TREUT : cletreut@apecita.com
Anne-Laure BOUCLY PERROT : alperrot@apecita.com
À la recherche de la double compétence TECHNIQUE ET COMMERCIALE
Quels sont les débouchés dans le secteur du commerce en agriculture et en agroalimentaire ? Quelles sont les compétences recherchées par les recruteurs ? Comment évoluent les métiers de la filière ? Autant de questions auxquelles répondent Anne-Laure Boucly-Perrot et Coline Le Treut, référentes commerce à l’APECITA.
Quels sont les principaux débouchés qu’offre la filière du commerce dans les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire ?
Coline Le Treut : Avant toute chose, il est important de préciser que l’agriculture et l’agroalimentaire regroupent de très nombreuses filières : les productions végétales et animales, les fruits et légumes, la vigne et le vin, mais aussi l’aquaculture, le bois et la forêt, le paysage, sans oublier l’agroéquipement, l’agrofourniture… Tous ces secteurs offrent de nombreuses opportunités dans le domaine du commerce.
Anne-Laure Boucly-Perrot : Le milieu du commerce, au sens large, recouvre une diversité de métiers. Le principal d’entre eux reste bien évidemment celui de commercial (nomade ou sédentaire), auquel il faut ajouter, dans la filière agricole, une dimension technique importante (technico-commercial). On re- trouve également des métiers liés à l’encadrement, comme celui de directeur, ou encore ceux en lien avec le marketing (chef de produit, responsable développement, responsable marketing…), sans oublier tous les postes administratifs en support du commerce (assistant commercial, assistant administration des ventes…). On peut également citer les postes en lien avec l’achat ou avec l’import-export. Tous ces différents métiers sont représentés dans la carte mentale ci-contre.
Ces différents postes sont-ils accessibles à tous les niveaux de formation ? Si oui, quels sont les niveaux ou les diplômes les plus recherchés ?
A-L. B-P. : À l’APECITA, la grande majorité des postes de technico- commerciaux sont accessibles aux titulaires d’un diplôme Bac + 2. Certaines entreprises peuvent également embaucher à un niveau supérieur de type Bac + 3/+ 5, ce qui peut être le cas de structures de taille assez importante, qui permettront au candidat d’évoluer vers des postes à responsabilités après quelques années. Les postes en lien avec les achats et le marketing sont davantage accessibles à un niveau Bac + 5 (ingénieur/master).
Le niveau Bac (type Bac pro technicien conseil vente de pro- duits de jardin) peut être suffisant pour postuler à un poste de conseiller-vendeur.
De plus, il ne faut pas oublier toutes les formations qualifiantes, comme les CQP ou les CS. Ces cursus ne correspondent pas forcément à un niveau de diplômes, mais ils permettent aux titulaires d’acquérir une expertise et de nouvelles compétences, et, en somme, d’ac- croître leur qualification et donc leur employabilité. Elles sont reconnues et recherchées par les recruteurs! Souvent spécifiques à une filière (agroéquipement, vins et œnotourisme, agroalimentaire, horticulture…), elles offrent la possibilité de se spécialiser après un diplôme plus « généraliste » et permettent aux candidats de se démarquer de la concurrence.
Au-delà du diplôme, quelles sont les compétences et les qualités attendues par les recruteurs ?
A-L. B-P. : Comme pour tout poste de commercial, les recruteurs re- cherchent des personnes motivées et ayant de bonnes aptitudes relationnelles. Mais dans nos filières agricoles, cela est rarement suffisant. En plus, le commercial se doit souvent d’apporter un conseil technique à son client et, parfois, d’assurer le SAV. Cette facette du métier est encore plus marquée que dans d’autres secteurs économiques. C’est pourquoi les entreprises souhaitent avant tout des candidats ayant un bon bagage technique, et privilégient largement les détenteurs d’un diplôme en agriculture, en agroalimentaire ou, a minima, ceux qui pourront témoigner d’une expérience solide dans le monde agricole. Comme cette double compétence technique et commerciale n’est pas toujours facile à trouver, il n’est pas rare de voir des employeurs préférer embaucher des personnes maîtrisant les aspects techniques pour les former, en interne, à la négociation commerciale. L’inverse existe égale- ment. Mais c’est plutôt le cas des structures de taille importante, qui mettent en place un parcours de formation dédié à la technique des produits.
C. L-T. : Au-delà des compétences, les recruteurs sont très attentifs aux qualités des candidats, ce que l’on appelle les « soft skills ». Ils recherchent avant tout des personnes sachant faire preuve d’autonomie, de persévérance, d’écoute, de force de conviction et ayant de très bonnes aptitudes relationnelles. Le goût du challenge et du résultat est aussi primordial pour bien s’épanouir dans ces métiers. La capacité à travailler en équipe est également très importante. En effet, si le commercial en agriculture et en agroalimentaire doit bien connaître l’aspect technique des produits et des services qu’il vend, il ne peut évidemment pas tout maîtriser. Il est donc essentiel qu’il puisse cher- cher l’information, par exemple auprès des conseillers techniques de l’entreprise.
Les entreprises de la filière offrent-elles des perspectives d’évolution ?
A-L. B-P. : Si l’on souhaite évoluer en interne, les perspectives d’évolution dépendent fortement de la taille de la structure. Mais de manière générale, il n’est pas rare de voir un technico-commercial évoluer vers un poste de responsable des ventes voire vers un poste marketing, après quelques années sur le terrain. De la même manière, un conseiller-vendeur peut très bien de- venir directeur de magasin. Si cela n’est pas possible dans l’enseigne pour laquelle il tra- vaille, il pourra toujours pré- tendre à de tels postes dans d’autres enseignes. Dans ce cas, il est probable qu’il doive acquérir de nouvelles compétences et connaissances par le biais, par exemple, de la formation professionnelle continue.
C. L-T. : Notons également qu’il est tout à fait possible de « commencer » une expérience dans le commerce pour des profils plus expérimentés dans des domaines techniques. Il n’est ainsi pas rare de voir des personnes en production, des exploitants ou des chefs de culture, se réorienter vers un métier de commercial.
Globalement, comment se porte le marché de l’emploi dans le secteur du commerce ? Est-il actif dans toutes les régions ?
C. L-T. : Les métiers du commerce représentent la plus grande fa- mille des offres diffusées par l’APECITA, et le turn-over est par- fois élevé sur ces métiers. Ces postes existent sur l’ensemble du territoire et dans toutes les filières agricoles et agroalimentaires. Mais il est important de préciser que puisque chaque filière a des spécificités propres, il peut s’avérer compliqué de changer de secteur (par exemple, de la filière vin à celle des productions animales).
Existe-t-il des métiers dits « en tension » où les employeurs connaissent des difficultés à recruter ? Si oui, comment l’explique-t-on ?
A-L. B-P. : Le métier de technico-commercial reste l’un des principaux métiers en tension, sûrement en raison des conditions d’exercice : taille parfois importante des secteurs à couvrir, déplacements nombreux… De plus, les jeunes ont souvent une image négative du métier. Ils ont bien souvent l’image du vendeur d’aspirateur qui met son pied dans la porte et qui essaiera de conclure une vente par tous les moyens. Mais ils oublient que l’intérêt des entre- prises est de fidéliser sa clientèle qui a, dans nos secteurs d’activité, des besoins liés à des produits techniques, et que le client recherche avant tout un conseil et non un « simple » produit. C’est pourquoi la connaissance technique est primordiale, même si la fibre commerciale est également indispensable.
C. L-T. : Dans un monde agricole en pleine évolution et qui doit répondre à de nombreux défis notamment environnementaux, les métiers du commerce participent également à la transition agroécologique du secteur. C’est un challenge extrêmement valorisant pour les salariés !
A-L. B-P. : Enfin, notons que, face aux difficultés de recrute- ment, certaines entreprises font le choix de développer l’alternance et l’apprentissage. Pour les jeunes étudiants, c’est un très bon moyen d’appréhender le métier et de se forger une première expérience.
Voit- on se développer de nouveaux métiers, des métiers d’avenir ?
A-L. B-P. : Si le cœur des métiers du commerce reste le même, on demande aujourd’hui aux candidats de nouvelles compétences, notamment au niveau tech- nique. Car désormais, le technico-commercial a en face de lui des clients de mieux en mieux formés et de plus en plus informés. C’est grâce à cette maîtrise technique qu’un technico-commercial pourra facilement faire ses preuves et gagner sa légitimité face à ses clients.
C. L-T. : On peut tout de même constater l’émergence du e-commerce depuis quelques années. Le monde agricole n’échappe à cette tendance. Les postes proposés par les entreprises de e-commerce sont sensiblement les mêmes que ceux qu’e l’on trouve dans des entreprises plus classiques, mais la manière d’exercer diffère. Ce sont des emplois beaucoup plus sédentaires, qui demandent une très bonne maîtrise, mais surtout une appétence pour les outils informa- tiques et les nouvelles technologies. C’est un aspect à ne pas négliger avant de postuler.
Propose recueillis par Aude Bressolier (Cahier Expert L'emploi dans le commerce, 2021)
Crédit photo : BUDIMIR JEVTIC / ADOBE STOCK