
Que ce soit une démarche de couple ou seul, pour rejoindre un conjoint ou encore par conviction, les motifs de reconversion vers les métiers de l’agriculture sont variés, tout comme les profils des personnes qui s’y engagent. Ce qui est sûr, c’est que la décision est rarement regrettée.
Murielle Grégoire (Doubs)
UNE RECONVERSION EN COUPLE DANS L’AGROALIMENTAIRE
Murielle Grégoire et son conjoint Yannick menaient tous deux une carrière professionnelle dans la banque. Ensemble, ils ont tout quitté pour reprendre une conserverie d’escargots de Bourgogne, la dernière en France à faire venir ses escargots vivants. « La banque ne correspondait plus vraiment à nos valeurs, explique Murielle Grégoire. Nous avons alors entamé un tour de France afin de définir nos critères et de trouver un type d’entreprise qui nous plairait. Nos motivations tournaient autour de l’agroalimentaire, de l’artisanat et de la gastronomie. N’ayant pas de formation dans l’agroalimentaire, nous voulions une entreprise à reprendre plutôt que de créer quelque chose afin d’être accompagnés et formés lors de la transmission. » C’était aussi pour eux un moyen de se sécuriser avec une affaire qui tourne déjà, plutôt que de partir de zéro et d’aller vers l’inconnu. Le couple tombe alors sur la conserverie Jacot Billey, spécialisée dans les escargots, et qu’ils reprennent en février 2018. « Claude Billey, son cédant, était vraiment dans l’optique de transmettre son savoir-faire au-delà de simplement son entreprise, souligne Murielle Grégoire. Aujourd’hui, nous sommes heureux de ce changement professionnel et malgré quelques incidents de parcours depuis la reprise, nous ne ferions marche arrière pour rien au monde. » Depuis leur reprise de la société, Murielle Grégoire et son conjoint ont développé de nouvelles choses en étoffant notamment la gamme de produits. Ils ne comptent pas s’arrêter là et ils ont encore d’autres projets en tête.
Christel Chipon (Mayenne)
L’ÉLEVAGE D’ALPAGAS AU COEUR DU BOCAGE MAYENNAIS
Après vingt-cinq ans passés dans l’Éducation nationale en tant que professeure d’histoire et géographie, Christel Chipon a renoué avec ses premières amours, les animaux. Elle est aujourd’hui éleveuse d’alpagas en Mayenne. « Ce changement ne s’est pas fait sur un coup de tête. J’adore les animaux depuis toute jeune et je rêvais de devenir vétérinaire. À 18 ans, je voulais même monter un centre équestre, sourit Christel Chipon. Finalement, la vie a fait que je suis partie vers d’autres études mais avec toujours dans un coin de ma tête l’idée qu’un jour j’aurai ma ferme. » Bien qu’ayant toujours eu des chevaux et l’objectif de monter un élevage équin, l’ancienne professeure s’est retrouvée un peu par hasard à élever des alpagas. En 2007, elle passe un BEPA à distance dans le domaine équin afin de pouvoir s’installer. Entre-temps, elle découvre d’abord les lamas puis fait la connaissance des alpagas et décide de bifurquer vers l’élevage de ces camélidés, moins répandus que les chevaux. Après avoir trouvé une ferme, elle s’installe finalement début 2012. Elle dispose d’un troupeau de plus de soixante-dix alpagas destinés à la vente aux particuliers et aux éleveurs. En parallèle, elle commercialise la laine de ses animaux. Elle propose également des formations pour mieux connaître les alpagas ainsi que sur le filage de la laine. Satisfaite de sa deuxième vie professionnelle, Christel Chipon explique cependant : « C’est un métier très prenant et qui fait vivre un petit peu à l’écart du monde. Il n’y a pas de vacances ni de jours fériés, il faut s’occuper des animaux tous les jours. Mais c’est une contrainte que j’accepte. »
Sébastien Fontaine (Île-de-France)
TRANSPOSER SON EXPÉRIENCE DANS LE CONSEIL AU PROFIT DE L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE
Conseiller commercial dans l’automobile pendant seize ans, Sébastien Fontaine souhaitait, par sa profession, contribuer à l’écologie et évoluer dans un métier plus en phase avec l’environnement. « J’ai toujours eu envie de travailler dans un domaine qui touche à l’écologie et à la protection de l’écosystème, explique Sébastien Fontaine. Je me suis dirigé vers l’agriculture biologique suite à sa découverte en tant que consommateur. Cela ne me suffisait plus de simplement consommer des produits biologiques et je voulais aller plus loin en participant au développement de ces pratiques. » L’homme ne se voyait pas devenir agriculteur, mais il souhaitait transposer son expérience dans le conseil au profit de l’agriculture biologique. Son objectif est alors de s’orienter vers un poste d’auditeur en agriculture biologique auprès d’organismes de certification. Pour cela, il s’est formé à ce type de production et s’est d’abord dirigé vers un BTSA ACSE afin de comprendre le fonctionnement d’une exploitation agricole. Comme cette formation n’est pas spécialisée en agriculture biologique, et dans l’optique de parfaire ses connaissances techniques en maraîchage bio, il enchaîne avec un BPREA dans lequel est proposée une formation dédiée à l’agriculture urbaine. « Le BPREA m’a également permis de continuer à avoir des expériences terrain grâce aux stages, précise Sébastien Fontaine. Depuis octobre dernier, j’ai terminé ma formation et je suis actuellement à la recherche d’un poste en tant qu’auditeur dans un organisme de certification en Île-de-France. Je regarde également des alternatives dont les missions seraient de promouvoir l’agroécologie et de valoriser les productions issues de l’agriculture biologique. Au final, malgré les quelques difficultés pour trouver un emploi dans le domaine, je suis très content de mon choix. C’est une expérience enrichissante et je reste déterminé à poursuivre dans cette voie. »
Isabelle Boussard (Yonne)
SE RECONVERTIR DANS LA VITICULTURE PAR AMOUR
C’est par amour qu’Isabelle Boussard a changé de voie professionnelle afin de rejoindre son mari, agriculteur céréalier et viticulteur dans l’Yonne. Diplômée d’un BTS dans le tourisme, elle a notamment travaillé dix-sept ans dans un cabinet d’architecte et trois ans et demi dans la grande distribution. C’est pour remplacer le départ à la retraite de son beau-père qu’elle rejoint l’exploitation de son mari. Elle reprend la partie administrative mais aussi la partie commercialisation du vin de Bourgogne et du chablis produits sur le domaine. « Depuis mon arrivée en 2012, j’ai doublé le chiffre d’affaires, témoigne Isabelle Boussard. J’ai également développé la communication sous diverses formes, avec les réseaux sociaux par exemple. » Pour cela, elle n’a pas suivi de formation particulière et a juste participé aux « Lundis de l’école des vins » à Beaune. Une formation gratuite de trois heures pour la compréhension et les bases de la dégustation des vins de Bourgogne. Le reste, elle l’a appris sur le tas auprès de son mari et de son beau-père. « Au départ, je craignais de ne pas être à leur hauteur vis-à-vis de leur contact avec les clients lorsqu’ils viennent au caveau. Mais finalement, comme je suis à l’aise avec les personnes en général et que je n’ai pas peur d’aller à leur rencontre, j’ai réussi à me faire ma clientèle. Aujourd’hui, je suis très heureuse de mon choix. La seule chose qui pourrait me faire changer d’orientation professionnelle serait que cela ne soit plus viable économiquement. »
WILLY DESCHAMPS (Tribune Verte N°2956)
Crédit photo : VISUAL GENERATION/ADOBE STOCK SAUF MENTIONS